« Il tuera son père. Il épousera sa mère. »
Et il faut avouer qu’entre les jours fériés et les autres projets des enseignants du collège, le temps a manqué en cette fin d’année pour travailler le texte et la mise en scène. Qu’à cela ne tienne, le professeur de latin des élèves de 3ème savait pouvoir compter sur leur travail et leurs qualités pour mener ce projet à bien.
Et ces derniers ont été à la hauteur ! Ils se sont réparti les rôles, se sont emparé des mille vers que compte la tragédie de Sénèque, se les sont mis en tête et en bouche, respectant l’alternance entre parties dansées par le chœur et parties clamées par les personnages : Œdipe dont « le destin avait deux noms affreux, le parricide et l’inceste » ; son épouse – et mère – qui lui rappelle qu’ « un vrai roi reste debout » ; Créon qui lui intime d’ « expier le meurtre du roi, […] exiler l’assassin, […] venger Laïos » ; Tirésias et sa fille, Mantô, qui, tenant un foie de génisse entre les mains et en consultant les entrailles, annoncent au roi un mauvais présage ; le vieillard de Corinthe et Phorbas, l’esclave préposé aux troupeaux, qui lui révèlent que c’est lui-même le coupable qu’il recherche…
Tous les ingrédients étaient là pour permettre aux latinistes d’imaginer une mise en scène « spectaculaire » au sens étymologique du terme, rythmée par les interventions du chœur commentant les événements et faisant « monter la pression ». De même, les élèves se sont évertués à camper des personnages avec leur caractère et leur part de vérité, montrant Œdipe en héros tragique aveuglé par son hybris et craignant de commettre le crime qu’il a déjà accompli, perdant la raison et par là même ses repères humains, basculant du dolor au furor, et favorisant ainsi l’avènement de la catastrophe finale : sa mère-épouse se suicide tandis que lui, Œdipe, se crève les yeux.
« La tragédie romaine, écrivait Florence Dupont spécialiste des monstres de Sénèque, promet au public romain le spectacle de la métamorphose d’un homme en monstre. » C’est ce qu’ont réussi à mettre en scène les latinistes de 3ème devant leur public altiligérien.
M. LASCHAMP
Professeur de lettres classiques